EVALUATION DES STOCKS ET MODELES DE GESTION

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Les commissions de pêche connaissent souvent de grosses difficultés lorsqu'elles s'efforcent de tenir explicitement compte des incertitudes inhérentes aux paramètres biologiques clés dans de nombreux modèles mathématiques utilisés dans la gestion des stocks exploités et l'évaluation de leur statut.

La CCAMLR a développé des modèles qui tentent d'incorporer quelques-uns des effets de l'incertitude dans l'analyse des paramètres biologiques et dans les avis de gestion qui en découleront. A ce jour, la CCAMLR a toujours joué un rôle pilote dans le développement de ce type de modèles qu'elle applique tant aux espèces visées qu'aux espèces dépendantes. Les résultats des modèles servent ensuite à identifier les options de gestion qui seront sélectionnées objectivement pour fixer les limites de captures qui correspondent le mieux aux objectifs de l'Article II de la Convention.

Le développement des modèles d'évaluation et de gestion par la CCAMLR s'est fait en quatre étapes distinctes :

i) Les premières années, conformément à l'usage établi à l'époque, la CCAMLR avait adopté une approche monospécifique (à savoir, en fonction de l'espèce visée par la pêche). Les efforts déployés par la CCAMLR pour gérer des pêcheries multispécifiques et s'en tenir à une approche tenant compte de l'écosystème, ont révélé la nécessité de créer des modèles de gestion plus réalistes et plus complexes.

ii) Dès 1994, la CCAMLR avait développé un 'Modèle de rendement du krill' (KYM) qui devait servir à fixer la limite de capture de précaution* de la pêcherie de krill. Le KYM a été créé afin

a) de faciliter l'atteinte des objectifs de la Convention,

b) de mieux tenir compte de l'incertitude inhérente à l'estimation du rendement potentiel du krill, et

c) de faire reposer les décisions de gestion sur des règles claires et approuvées (dites 'critères de décision').

En fait, le KYM combine les estimations de la biomasse du krill (B0) avec un facteur qui tient compte de la variabilité des caractéristiques de la biologie de l'espèce (telles que la croissance et la mortalité).

Ensuite, les critères de décision sont appliqués pour dériver une limite de capture de précaution qui permet de maintenir des taux de capture raisonnables pour les pêcheries tout en évitant une surpêche qui pourrait compromettre la productivité biologique du stock concerné. Les résultats du KYM ont été ajustés grâce aux nouvelles données provenant de la campagne d'évaluation synoptique CCAMLR-2000, ce qui a permis de réduire de beaucoup l'incertitude liée aux estimations disponibles de B0 du krill de la zone 48.

iii) Le 'Modèle de rendement généralisé' (GYM) est dérivé du KYM et applique une approche similaire aux pêcheries de poisson de la CCAMLR. Il utilise des estimations de biomasse soit actuelle soit de pré-exploitation, ainsi que les incertitudes biologiques qui y sont inhérentes.

Il est également tenu compte des fluctuations du recrutement (c'est-à-dire du remplacement du stock par les juvéniles).

Le GYM permet à la CCAMLR de prédire les effets des divers niveaux de capture, même en l'absence d'estimations directes de l'abondance des stocks. Il est alors possible de calculer les limites de capture de précaution.

Parallèlement à la mise au point du GYM , après celle du KYM, la CCAMLR a établi des critères de décision à utiliser dans la gestion de la pêche de légine (Dissostichus spp.).

iv) Le 'Modèle secteur alimentaire/pêcherie' (FFM) vise à formaliser les descriptions des relations fonctionnelles entre le krill et ses prédateurs. Etant donné que les activités de pêche les plus intenses se déroulent souvent sur les sites de reproduction ou d'alimentation des prédateurs de krill, ou en leur proximité, des estimations à grande échelle de la biomasse de krill n'indiquent pas toujours la 'disponibilité' du krill pour les populations concernées. La CCAMLR met donc en place ce FFM pour évaluer les interactions, ainsi que le chevauchement potentiel (spatio-temporel) entre la pêcherie et les prédateurs recherchant le krill.

Les approches de gestion multispécifiques développées par la CCAMLR sont sans précédent. Dans leur forme simplifiée, les modèles décrits ci-dessus ne nécessitent pas l'évaluation d'un grand nombre de valeurs paramétriques. Il est pourtant nécessaire de dériver une estimation de l'incertitude connexe, ce qui complique l'application des modèles. Avec la base des données qui ne cesse de s'accroître, ces modèles ont nettement contribué à la création d'une approche stratégique et pratique par la CCAMLR pour décrire les interactions potentielles entre la pêche, les espèces exploitées et autres espèces dépendant des espèces exploitées, ou qui leur sont voisines.

La CCAMLR s'est également lancée dans le développement de modèles stratégiques pour faciliter la détermination des priorités scientifiques et décider des options de gestion.

*Telles qu'elles sont appliquées par la CCAMLR, les limites de capture de précaution établissent des seuils de capture qui sont estimés suffisamment faibles pour ne pas compromettre la pérennité des stocks visés. Elles autorisent un volume de pêche suffisant pour fournir des informations essentielles pour l'évaluation du rendement du stock et des caractéristiques de la pêcherie. La mesure de conservation 51-01 de la CCAMLR en est un exemple type qui fixe une limite générale de capture de précaution pour le krill de la zone 48 ainsi qu'un "seuil déclencheur" servant à subdiviser la limite générale pour qu'elle soit applicable à des secteurs moins étendus en prévision d'une expansion rapide de la pêcherie.